On ne commence pas par Nikolai.

Fils de Markov, Nikolai Markov Velikov débordait d’aspirations. Considéré comme un excentrique génie de la science moderne, ce n’était pas les accomplissements qu’il manquait. Malgré son intellect fort développé, il avait toutefois un terrible défaut…

On ne continue pas avec Catalia.

D’origines plus ou moins modestes, Catalia, après avoir abandonné son passé et marié Nikolai, donna naissance à deux enfants. Après la seconde naissance, suivant des complications, Catalia se retrouva alité pour le reste de sa vie.

On ne contemple pas le prestige.

Le couple n’avait jamais montré de tendances criminelles. Leur vie semblait presque monotone, si ce n’était de l’obsession de Nikolai avec les expérimentations alchimiques. La contribution des Velikov envers l’empire n’était en rien grandiose, mais qui peut leur retirer l’accomplissement d’inventer une dizaine de parfums, un détergent puissant et quelques liquides aux propriétés… intéressantes.

On ne voit pas sous notre nez.

Dans les dernières années, Nikolai commençait à voir trop grand. Plus il gagnait de renommée, plus il en voulait. La gloire passée ne parvenait plus à le satisfaire. Catalia succomba un matin d’automne, laissant derrière elle son époux et deux adolescents compétitifs. Nikolai cessa tout semblant de lucidité et s'enfouit dans ses recherches. Le problème monétaire se présenta rapidement, Nikolai ayant perdu la seule personne capable de le convaincre de ne pas se mettre les pieds dans les plats.
Et pourtant… Il ne manquait jamais de ressources.

On ne parle pas avec une langue de vipère.

Un voisin curieux commençait à se douter de quelque chose lorsque pendant la nuit, des visiteurs entraient par la cour arrière des Velikov. Deux énormes sacs avaient été emportés à l’intérieur, mais aucun ne ressortit. Après avoir alerté les autorités de ces événements louches, une enquête fut menée.

On ne confronte pas son supérieur.

Prouvé coupable de machinations envers l’empire, le fils fut condamné à mort sur le champ. Gregor Nikolai Velikov, sous la tutelle de son père Nikolai Markov Velikov, planifiait non seulement d’empoisonner les ressources d’eau de l’empire, mais également de produire un poison indétectable afin d’aider les extrémistes à assassiner l’empereur.
Nikolai, après avoir utilisé le corps de sa femme comme matériel, fut accusé plus par le temple que par l’empire pour sacrilège et irrespect envert Zox. Ayant perdu tout sens de lucidité à ce point, Nikolai divulguait dans tous les détails morbides comment il avait utilisé chacun des organes de Catalia comme Catalyste pour son expérimentation sur la substance qu’est une âme… Il fut exécuté après deux semaines de débat, certain jury désapprouvant un jugement hâtif de son cas précis.

On ne refuse pas le pardon.

De toute la famille, seule Nedelya Nikolaiva Velikov fut techniquement prouvée innocente des crimes connus. Venant tout juste d’atteindre la majorité, elle pu se défendre devant le jury en affirmant avoir été sous la menace constante de son frère. Cependant les circonstances jouant contre son argument, Nedelya devait être punie par la loi pour son silence jusqu’à présent. Le jugement tomba en faveur de travaux forcés. Tout appartenant aux Velikov fut saisi par l’empire et, désormais simplement Nedelya, évita la peine de mort en devenant esclave.

On ne termine pas une histoire sans fin.

Et ainsi commença la vie d’esclave de Nedelya. Si elle joue bien ses cartes, un affranchissement n’est pas impossible. Que ce soit cinq, dix ou vingt ans, elle était déterminée à survivre. Un jour, peut-être, dépassera-t-elle son défunt père.

On ne connaît pas toujours la valeur d’un trésor avant de l’avoir poli…

Suivre le chemin déjà emprunté par d’autres, plus expérimenté qu’elle. Ou se frayer son propre chemin à travers l’inconnu. Elle avait vu la destination finale, elle avait entendu les hurlements de haine, les cris de désespoir. Elle connaissait les conséquences qui l’attendaient si elle ne changeait pas de cap immédiatement. L’iceberg était en vue et son navire figuratif pointé directement sur celui-ci.
Les chaînes aux poignets, les boulets aux pieds. Elle se voyait prisonnière de quelque chose, de quelqu’un. Enchaînée sur son navire solitaire. À chaque seconde, elle sentait les dents acérées du vent de mer sur sa peau. Le souffle court, les muscles meurtris. Elle tira sans mettre de force sur les chaînes. Le bruit métallique résonna étrangement à travers l’air marin.
Le ciel se couvrait rapidement de nuages noir d’encre. L’orage approchait à grande vitesse.




Prise de panique, elle se mit à tirer sur ses chaînes comme une démenée. Maudissant son sort, sa famille, ses voisins… Elle tirait si fort qu’elle s’arrachait la peau. Une vague bouscula le navire, envoyant Nedelya sur le sol du pont. Elle entendit le tonnerre au loin, puis de nouveau plus proche. Une seconde vague, Nedelya tomba de nouveau. La pluie s'abat sur son navire tel un dragon sur un âne. Elle était glaciale, Nedelya se rendit alors compte qu’elle n’était vêtue de rien. Chaque goutte semblait la transpercer d’aiguille.




Sonnée, mais désormais en mesure de se déplacer, Nedelya se rua vers la roue. Elle tente de le tourner de toutes ses forces. La roue n'offrait aucune résistance, ce qui surprit Nedelya. Dans sa stupeur, une nouvelle vague la renvoya, encore une fois, sur le sol. Cette fois glissant de par la pluie battante, Nedelya ne parvint pas à se redresser.




Alourdie par les chaînes et les boulets, Nedelya ne parvenait pas à se tenir à flot. Elle fut poussée loin de son navire par les vagues puissantes de l’océan. La dernière chose qu’elle pu voir avant de couler, ce fut un éclat verdoyant à l’horizon. Le dernier vestige de lumière en mer, un mirage que bien des marins connaissent… Mais pas Nedelya.

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C’est en hurlant et cherchant son air qu’elle se réveilla. Enchevêtrée dans ses draps, elle tomba du lit en se fracassant le nez sur le plancher de sa chambre au Domus Valerius. Les yeux remplis de larmes, le nez endoloris, et prisonnière de ses draps.
Elle mit un long moment à se remettre de ses cauchemars.

Après s’être nettoyée convenablement, quelques heures plus tard, Nedelya fixait son reflet dans l’eau du bain.
< Il est temps de changer > Dit-elle à voix basse.
< Il se moque de toi > Continua-t-elle après un bref moment.
< Rien ne t’empêche de... > Elle s'interrompit, son expression changeant pour un mélange de confusion et de colère mal placée.
< Et mordre la main qui te nourris? > demanda-t-elle, la voix tremblante.
< Jamais Greald ne va m'accepter et Seras m’a abandonné. Je ne suis pas parfaite mais jamais je n’accepterais de perdre la dernière nuance de fierté qu’il me reste. > d’un chuchotement fort, la colère se faisait entendre dans ses paroles.
< Le cycle se termine avec moi… Puisse Celus me pardonner. >
À ces derniers mots, Nedelya enfonça la main dans l’eau du bain. Distordant son reflet pour mettre fin à sa discussion… solitaire?

Elle avait une interminable liste de tâches à faire aujourd’hui. En commençant par le classement des dossiers éparpillés dans le bureau de Lusciana Valerius. Une tâche qui se devait d’être répétée plusieurs fois par jours.